Après avoir longuement hésité à s’implanter sur Internet et à utiliser le digital, l’industrie du luxe a désormais trouvé sa place dans cet univers tellement vaste. Mais alors, comment le luxe a-t-il réussi à se servir de cet outil sans perdre de vue ses valeurs premières ?
1. Deux domaines aux valeurs paradoxales
Un produit de luxe se définit par une très grande qualité, un raffinement sans égal, un prix onéreux et bien-sûr une rareté certaine, qui garantit aux consommateurs une différenciation importante et une originalité avérée.
Le luxe est associé à la richesse, qui permet des investissements qui visent non plus le profit, mais le pur agrément, relevant du superflu, pour montrer une grande aisance matérielle et le raffinement du goût.
Jusqu’alors, le luxe se définissait lui-même, par des campagnes internationales, ou par l’implantation d’un réseau de distribution très sélectif, « le marketing du rêve », fait alors son apparition. Il faut construire un idéal, un rêve à travers le produit de luxe, qui ne doit pas uniquement correspondre à des qualités techniques évidentes (au risque de devenir une marque dite de prestige), mais qui doit entretenir un désir profond.
C’est alors que nous remarquons les défis que lance Internet à l’industrie du luxe, comment les dirigeant des marques de luxe doivent-elles se servir de ce nouvel outils de communication, qui mettent pourtant en avant l’instantanéité, la consommation de masse, le changement ?
Même si Internet permet une diffusion d’image importante et très intéressante pour les marques de luxe, car le rêve se vit à travers les images, il faut tout de même se méfier de plusieurs aspects de celui-ci.
2. Les grandes ères du marketing du luxe digital
Il est vrai que les valeurs de l’un et l’autre semblent à tout point de vue totalement contradictoires. Les stratégies des industries de luxe se concentraient plus sur des sources « plus sérieuses » que le web cynique et caricatural. Les nombreuses pages de publicité de luxe dans les magazines suffisent à illustrer cette idée.
Mais petit à petit, le luxe apprend à connaître le digital et tous ses aspects. On peut observer trois périodes clés qui ont marqué ce rapprochement :
- Le luxe digital 1.0, de 2000 à 2005 : C’est l’époque du e-commerce, Hermès, Tiffany, Burberry, Gucci sont parmis les premières marques de luxe à se lancer dans la vente en ligne.
- Le luxe digital 2.0, de 2006 à 2010 : C’est l’époque de la communication sur les réseaux sociaux, qu’il a fallu rapidement intégrer.
- Le luxe digital 3.0, à partir de 2011 : C’est l’époque du e-marketing, les maisons de luxe ont alors placé leur marketing numérique au sein de leur stratégies de vente, sans pour autant orienter leur buisness model en direction du grand public.
On constate alors une digitalisation de l’industrie de luxe, qui a créée l’émergence d’un nouveau segment de marché, les Chinois, qui n’imaginent pas le luxe sans Internet, et surtout qui consomment 60% des produits de luxe mondiaux, selon Michel Campan, directeur de l’agence de communication digitale Same Same but different, spécialisée dans le luxe.
3. Quels sont les avantages du web pour le luxe ?
Bien qu’on aurait pu croire à l’absorbtion du luxe par le digital, c’est l’inverse qui se produit. L’industrie du luxe a su s’approprier le digital et ses possibilités.
En effet une des principales valeurs du luxe est la relation client élevée, voire exceptionnelle, qu’il est possible d’exploiter grâce au digital. Parce que la digitalisation ne signifie pas uniquement Internet et les réseaux-sociaux.
- Il est possible d’accélérer l’enregistrement et la livraison des commandes, la disponibilité en temps réel d’un produit en boutique peut désormais être vérifiée. De plus, la géolocalisation permet d’aider la clientèle à repérer les boutiques ou services annexes.
- Et surtout, développer la relation client est possible à distance et de façon très régulière. Certaines marques proposent à leurs clients d’entrer en communication avec un conseiller afin d’être accompagné lors du processus d’achat en ligne. Alors que d’autre se servent d’une assistance téléphonique ou mail, ou encore la planification de rendez-vous en boutique, pour entretenir un service personnalisé avec leurs consommateurs.
- L’utilisation de bornes automatiques pour régler un achat est également exploitable, ce qui renforce la notion de liberté véhiculée par le luxe.
- Les avis en lignes, qui deviennent de plus en plus importants dans le processus d’achat des consommateurs doivent également être pris en compte par les grandes marques de luxe. Ils représentent 30% des incitations à l’achat dans le domaine du luxe, bien que 75% des clients qui se renseignent en ligne concluent leur achat sur place, préférant l’expérience boutique.
- Les sites et blogs de passionnés jouent également un rôle primordial dans la stratégie de communication des marques de luxe. En effet, devenant des leaders d’opinion et générant une audience importante, ces blogs sont maintenant largement sollicités pour parler de leur produits, non pas comme un simple placement de produit, mais comme un contrat, l’un voulant intensifier sa présence sur le web, et l’autre qui en profite pour exprimer son amour pour une marque.
- Et malgré tout, les réseaux sociaux, qui permettent une diffusion d’images importante, et la diffusion en masse de ce « rêve inaccessible ».
On remarque alors que ce rapprochement entre le luxe et le digital a un double enjeu. Tout d’abord, la relation client est largement améliorée et facilitée grâce aux différents services qu’il est possible de proposer.
Dans un second temps, il permet au marketing de luxe de toucher une cible à la fois plus jeune, qui a l’habitude de commander sur Internet mais également plus éloignée géographiquement parlant, puisque le marché florissant des clients asiatiques de luxe n’a pas échappé aux dirigeant.
Mais alors, est ce que cette croissance rapide et importante de l’industrie du luxe ne va-t-il pas lui nuire à plus long terme ? Comment garder cette notion de « rêve inaccessible » lorsqu’il devient accessible à de plus en plus de personnes ?